Le patrimoine : de nombreuses traces d’activité humaine
L’activité humaine en adaptant son environnement à son mode de vie laisse des traces qui, d’années en années, constituent un patrimoine. Châteaux et cathédrales sont les traces les plus visibles. Mais il en existe d’autres comme les savoir-faire ou l’habitat troglodytique, les uns parce que pratique empirique ou les autres parce que souterrain. Ces patrimoines sont en général le signe tangible qu’un autre monde est possible ou que la réussite du passé peut se reproduire dans le futur à condition que les ressources soient pérennes.
L’époque moderne s’est satisfaite de considérer comme illimitées les ressources offertes par la planète. Le post-modernisme en revanche doit maintenant tenir compte des nuisances provoquées par le développement (même durable). Du néolithique à nos jours, la rage des hommes à soumettre la Nature à leurs besoins risque cependant de ne pas s’apaiser de si tôt. Ils ont acquis un bien commun, la terre elle-même comme si un monde meilleur n’était plus objet de croyance.
Le patrimoine durable était éphémère
Depuis un bout de temps déjà, le développement [1]occidental aspirait à durer éternellement. A cette époque, les ressources, tous comptes faits, étaient pour beaucoup illimitées. Tant et si bien que le dit développement se permettait de dépasser les bornes. Il passait d’ici et maintenant à l’infini des croyances sures et certaines.
- Croix pattée
- Croix pattée comme elle se voit un peu partout dans le Vexin
Dans ces conditions cependant, quelques uns ont bien vu l’absurdité d’une valse des denrées entre tous les pays. Ce qui était un coup de mains au voisin par temps de disette devenait un gâchis sans frontière. Rester très terre-à-terre devenait de ce fait très urgent. Désormais, le froment serait produit à partir de blé Apache cultivé localement. Il serait acheminé non loin de là pour être moulu à Char. Pour le vendre dans le Vexin, il serait marqué [2] de la croix pattée balisant la région depuis des temps immémoriaux.
- Croix pattée sur des pâton de pain du Vexin
- Les boulangers ont scarifié d’une croix pattée les pâtons du pain du patrimoine dans le four de l’Hermitage
- Enfournement
- Les pâtons sont disposés sur la sole en fonction de la répartition des températures sous la voûte (Crédits JFD)
- Pain du Vexin à croix pattée
- Du pain produit à partir de froment cultivé dans le Vexin, moulu non loin de là à Char et cuit au Château de Villarceaux
De leur côté, les autorités de la région ne pouvaient que soutenir la filière initiée par les Talmeliers : dès 2005, elles donnaient leur bénédiction au pain du Vexin. Une fois lancé, son succès fut de courte durée : après 5 ans d’existence, la filière cessait le 30 juillet 2010. Il ne se vendait pas assez vite et devait être stocké à grand frais trop longtemps.
Le pain du Vexin, dans ces conditions, ne pouvaient pas rivaliser avec la baguette très ordinaire. Le blé venait d’on ne sait où, cultivé à grand renfort d’intrants
[3]
pour des rendements très lucratifs. Mais à l’époque du pain du Vexin [4], la monoculture intensive laissait la nature dans un bel l’état ! Transport du blé, mouture de la farine, cuisson de la baguette coûtaient forcément moins qu’une bouchée de pain. Du coup, le pain du Vexin devenait hors de prix en comparaison. Le nerf de la guerre avait eu raison d’un savoir-faire patrimonial
Le patrimoine était durable mais méconnu
L’argent par lui-même était également responsable d’une méconnaissance : un grande partie du passé du quartier se tapit sous-terre.
- Hameau de l’Hermitage
- Cadastre napoléonien - 1815 Section B (extrait).
Les carrières [5] une fois inexploitées ne donnent, par conséquent, plus de signes de richesses extérieures. Pour les gestionnaires du bien commun, les carriers ou tailleurs de pierres sont de peu d’intérêt. Il n’ont laissé d’eux que la trace de leurs outils à défaut de savoir nous écrire. Pierres de taille ou remblais sont partis ailleurs.
- Echelle géologique
- Les roches et leurs fossiles de l’Hermitage et du Chou datent d’environ 40 millions d’années (juste après l’apparition des primates et bien après la disparition des dinosaures)
Ils ont laissé à découvert 40 millions d’années d’allers et venus de la mer lutécienne. A fleur de roche, les fossiles de turritelles sont très banales dans tout le bassin parisien. Ils auraient pu cependant convaincre ceux qui doutaient encore du changement climatique que notre quartier n’a pas toujours été semblable à celui d’aujourd’hui. Il y a bien longtemps, la mer lutécienne le recouvrait sous un climat tropical.
- Quand la mer tropicale recouvrait l’Hermitage et le Chou
- Etendue de la mer lutécienne tropicale
De nos jours, les nombreux automobilistes même perclus de canicules à répétition ne ralentissent pas au passage du "Goulet". Ils pourraient pourtant y voir les turritelles ou des coquillages de l’époque.
- Calcaire coquillier
- Au passage du "Goulet " ( rue A. Le Moine), les fossiles du calcaire coquillier du lutécien sont bien visibles
- Turitella terebellata
- Des coquillages voisins de ceux de l’Hermitage se trouvent à Gisors
Le savoir-faire durable a été oublié
Non loin de là, des traces d’activités humaines plus récentes sont bien visibles. Pour permettre aux charrettes de monter dans le Haut de l’Hermitage, le percement de 1876 [6]a baissé la déclivité du raidillon qui menait au Bois Païen.
- Traces de lance de carrier
- Sur la paroi du "Goulet", des traces de lance de carrier sont visibles. Elles indiquent la position des carriers au travail
Du coup, la carrière qui se trouvait à côté s’est vue abaissée également. Elle porte les traces d’un autre savoir-faire aujourd’hui disparu : celui des tailleurs de pierre travaillant avec les carriers. Leur technique d’extraction de la pierre -quand cette dernière était de meilleure qualité que le simple remblai - ne nécessitait pas d’autre énergie que la force musculaire humaine. [7]
- Technique ancienne d’extraction de la pierre
- A l’aide de leviers et d’outils spécifiques aux carriers et aux tailleurs de pierre, les carrières de l’Hermitage et du Chou ont été exploitées avant de devenir entrepôt ou champignonnière
- Outils de carriers
- Trace de défermage d’un bloc
- Après le souchevage, les blocs de pierre étaient défermés
- Coins de carriers et de tailleurs de pierre
- Des coins sont insérés entre les blocs
De ce fait, leur activité a duré des siècles livrant localement les pierres à moins de 30 km.
- Travail manuel de la roche
- Sans autre apport d’énergie que celle de la force humaine, les cavités ont pu être aménagée
- Demeure troglodytique des Fonds Saint Antoine
- Le site troglodytique aurait été l’habitation du macon du couvent des Mathurins.
- Habitations troglodytiques à l’Hermitage et au Chou
- Demeure troglodytique
- Parcelle AD-01-158-Etat actuel 2016. L’ancienne demeure troglodytique ne figure pas sur le cadastre napoléonien
- Lcalisation des cavités de la rue A Le Moine
- Les cavités de l’Hermitage et du Chou sont localisées dans les couches géologiques de Pontoise
L’eau, un patrimoine durable parce que sans âge
Le calcaire facile à creuser pour aménager un habitat creusé ne suffit pas à expliquer le peuplement ancien de ce quartier de Pontoise. L’eau nécessaire à la culture avant tout affleurait dans les marais le long de l’Oise et coulait dans la Ravine, son affluent.
- Plan d’intendance de 1778
- L’Hermitage est traversé par un affluent de l’Oise appelé la Ravine
Sur sa rive, un lavoir était aménagé pour les ménagères du hameau [8]. La consommation quotidienne des fermes était assurée par une série de puits.
- C. Pissarro, Un coin de l’Hermitage, Pontoise
- Huile sur toile 55 x 65 cm 1878 (PDRS 553), Kunstmuseum, Bâle (Suisse).
- Ravine de l’Hermitage
- Avant la renaturation, la Ravine affluent de l’Oise (état 2022)
Un savoir-faire millénaire dans une bouchée de pain
Faire connaître ce patrimoine ancestral au grand public exige toute une pédagogie. Heureusement, le four de l’Hermitage est un vestige visible du patrimoine. Un fois monté en température, il offre aux visiteurs du pain cuit à l’ancienne.
- Décennies d’expériences
- Les passionnés de boulangerie profitent de plusieurs années (voire de plusieur générations) d’expérience de la boulangerie
Cette année, bénévoles et boulangers ont mis la main à la pâte pour satisfaire un large public [9]
- Refente des billots
- Pour les chauffes intermédiaires, les billots sont refendus en bûche de plus petites tailles
- Conseils à suivre
- Giovanni et Benjamin recoivent les conseils de M. Doisneau
- Allumage des bûches
- La combustion du bois est toujours un moment crucial dans la montée en température du four
- Le tirage amorce la combustion
- Tirage dans le four
- La cheminée à l’extérieur de la voûte provoque un appel d’air qui attise le feu
- 3 apprentis apprennent à maitriser le four
- Nettoyage de la sole
- Après chaque chauffe, les cendres sont sorties du four
- Elimination des cendres
- Les officiels du pain du patrimoine
- M. Gauthier F (Fédération de la Boulangerie du Val d’Oise) M. Président de la Fédération Régionale de la Boulangerie-Pâtisserie de l’Ile-de-France, M. Doisneau_M, Secrétaire
- Premiers essais
- Les apprentis boulangers se font la main
- Giovanni faconne sa pâte
- Faconnage
- Tour de mains pour le faconnage
- Faconnage de la pâte fraîche
- Faconnage
- Tour de mains pour le faconnage
- M. Doisneau encadre les nouveaux boulangers
- Mokhtar enfourne
- Pâton dans le four
- Maniement de la pelle
- Premiers pains du patrimoine
- Mie de pain bien formée
- La qualité de la mie dépend du choc thermique des pâtons à l’entrée du four qui fait éclater les bulles de gaz carbonique enfermées dans la pâte fermentée.
- Le pain du patrimoine en dégustation
- Dégustation
- Du miel sur du pain
- Dégustation
- L’habitat troglodytique évoqué près du four
- La dégustation de pain ne fait pas oublier le patrimoine durable de l’habitat troglodytique
- Le boulanger et sa boulangère
- Comme il est de coutume dans les boulangeries où le boulanger est au fourneau pendant que la boulangère tient la caisse, une bénévole sourit à son apprenti boulanger.
- Braises pour la pizza
- Contrairement au pain, la pizza se cuit à four ouvert : les braises de la dernière cuisson sont conservées pour offrir aux bénévoles une pizza conviviale en fin de journée.
- Cuisson de la pizza à feu ouvert
- Première pizza
- Une part de pizza
- Les nouveaux boulangers bénévoles
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