Château-Verger : un château de légende ?
Les variations sur la désignation du lieu-dit ” Château Verger” sont nombreuses ! Ainsi, Château-Verger apparaît dans un acte notarié de la Maison du four à pain :
"une maison située à Pontoise quartier de l’Ermitage, lieu le
chateau Verger ayant une entrée sur la sente des voiriers et une
sortie sur le chemin du Château Verger ; composée d’une maison
d’habitation, chambre et grenier dessus, grange à côté couverte en
chaume, cellier, étable à vaches, étable à porcs le tout
taillé dans le roc, cour & petit jardin clos de murs,
tenant par devant la sente, par en haut le chemin, d’un côté
Vincent Maitre, d’autre côté Denis Dubray."
(Bail à rente de 1850 - Transcription D. Arcival et JF Doucet)
Mais N. Taillepied [1] utilise ” Chateau Belger ” pour désigner l’endroit :
”On voit encore aujourd’hui à vue d’oeil les ruines de l’un des chasteaux, l’autre qui est encore en estre ; ce chasteau ruiné s’appelle le chasteau Belger, et par la succession des temps que le langage s’est corrompu par la descente des Romains, Gots, Visigots et Ostrogots, on dit Verger pour dire Berger par changement de lettres, comme i l advient souvent qu’on se sert d’un V pour un B et d’une R pour une L, et au contraire.”
Op. Cit. P 73
Sans qu’il soit possible de douter de l’endroit où se trouve ce ”Chasteau Belger”, l’origine de son nom est pour le moins fantaisiste :
“Ce chasteau ruiné est sur un rocher en un coin de montaigne, tout devant la place de Maubuisson, de l’autre costé de la rivière ou il y a encore plusieurs petites maisons au bas des ruines, sur le chemin par ou on va de la ville au village d’Auvers. Quand Jules César subjugua au domaine des Romains toute la Gaule Belgique, il assiégea ledit Chasteau Belger, qu’il fist démolir estant entré dedans mais l’autre qu’on nommoit Mont-Belgien, et par corruption de langage Montbelien, ne fut point ruiné ni les maisons d’alentour, mais demoura en son entier comme on le void de présent.”
Op. Cit. P 73
Un roi légendaire nommé Belgius
En fait, N. Taillepied fait allusion à “Belgius” roi de Gaule qui aurait donné son nom à la Belgique après avoir fondé la ville de Pontoise :
“Qu’entre autres rois de Gaule, fut un nommé Belgius, quatorzième roy, duquel une partie de la Gaule est dite Belgique et en ce pays fonda une ville à l’entour de laquelle le pays est de lui appelé Belgassin, qui est le pays ou est située et assise nostre bonne ville de Pontoise.
Or, pour faire ample description de cette ville, il est plus que raisonnable, de traicter premièrement du pays ou elle est située, à scavoir du Vequecin[3], ainsi appellé comme dit est, de Belgius, roi de Gaule, pour ce que en ce pays ledit prince fit son séjour et demeure ordinaire pour la plus part de sa vie, et a bon droit car c’est la terre la plus grasse et plus fertile qui soit en la France quant à toutes sortes de commodités requises pour la nécessité des vivres.”
Malheureusement, le Roi Belgius est, semble-t-il, une légende ce qui rend peu crédibles les étymologies utilisant son nom. Faire dériver le nom de la hauteur sur laquelle s’est édifiée Pontoise, le “Mont bélien”, d’un Mont-Belgien exige de N. Taillepied d’autre part une bonne dose d’imagination.
Quoiqu’il en soit, les variations du terme ” Château-Verger ” en Château Belger [2] subsiste encore de nos jours lorsque le cadastre ne se risque pas à un ” Chateau du Berger” qui n’est pas sans rappeler N. Taillepied.
Quoiqu’il en soit, Château Verger [3] est mentionné dans l’acte du 1 Sept 1642 :
C’est assavoir
une petite maison, cour carrière estable à vache
jardin et vingne y attenante le lieu comme il se
comporte, le tout clos d’un Mur assiz andict chasteau
Verger, que tenoit en possession cy ducdit Jean
Rousseau Mannouvrier(3) dmt [1]audit lieu, sur quoi
il auroit retourné(4), faulte de payement des
rentes par luy dubus, tenant d’un costé et des
deulx bouts ladite bailleresse, d’aultre costé la
sente
[4]
où
"le tout clos d’un Mur assiz andict chasteau
Verger,"
signifierait que la Maison du four à pain et Chateau Verger [5] avait un mur mitoyen.
Et si la légende avait quelque chose de vrai ?
Tout pourrait, en l’état, rester une belle légende si Mme Sabine Robert, [6]après avoir cité N. Taillepied ne mentionnait dans son mémoire [7] les anomalies parcellaires repérées sur le cadastre qui pourraient signaler la présence d’un lieu fortifié.
Ces anomalies viendraient confirmer l’existence de ruines apercues par N. Taillepied au XVIème siècle. De plus, la vue d’Israël Silvestre, (1621-1681) figure en arrière plan une petite tour qui pourrait appartenir à ce Château-Verger.
[...] Mais seules des données archéologiques ou des mentions archivistiques permettraient de préciser l’origine et la nature de cet édifice et, ainsi, de confirmer ou d’infirmer la légende.